L’affrontement Govou-Ribéry

Equipe de France de Football - Prolongations

« Franck Ribéry est-il indispensable au jeu des Bleus ? », c’est en substance la question que le me suis posé hier soir avant de me coucher et à laquelle je vais tenter d’apporter brièvement quelques pistes de réponse.

 

Franck Ribéry et Sidney Govou, deux joueurs que l'on oppose souvent. (Photo DPPI)

Pour écrire certains de mes posts, je surfe très régulièrement sur un site de « statistiques » que j’apprécie beaucoup, Sélection A, qui regroupe les différentes données liées à l’équipe de France depuis 1994 et l’entrée en fonction du bien connu Aimé Jacquet. Hier soir, une idée m’est venue, pourquoi ne pas comparer Franck Ribéry et Sidney Govou, deux joueurs qu’a priori tout oppose : alors que tout le monde ou presque a toujours réclamé le premier et s’est toujours offusqué qu’on ne cède pas à ses moindres caprices, lui le grand joueur que la France attendait et qui allait redorer à lui tout seul le blason des Bleus, on a toujours tout reproché au second, que ce soit son style (trop éloigné de celui du chti et donc ennuyeux), son état d’esprit (moins blagueur que le chti et donc plus déprimant), son club (le plus détesté des Olympiques n’ayant pas droit de cité face à l’OM ou au Bayern) ou encore son apport à l’équipe (soit disant proche du néant là où le Munichois débloquait des matchs à lui tout seul). Bref, en attendant la petite finale de la Coupe du Monde ce soir, je vais tenter de vous montrer que tout cela est loin d’être évident…

Tout d’abord comparons les deux joueurs en termes de statistiques (j’essaie d’employer ce mot avec modération et réserve, je ne suis pas statisticien) grossières. Sidney Govou, qui va avoir 31 ans, compte 49 sélections en équipe de France A (la première en 2002 à 23 ans), pour 10 buts inscrits. Franck Ribéry, vient quant à lui d’avoir 27 ans, et compte 48 sélections (la première à 23 ans), toutes sous l’ère Domenech, pour 7 buts inscrits. Ce qui fait un bon point de départ dans ma réflexion, c’est que les deux joueurs ont commencé au même âge chez les Bleus, et comptent aujourd’hui le même nombre de sélections. Pratique. La première chose qui m’a choquée en regardant ces stats, c’est que, pour un nombre égal de sélections, le soi-disant grand joueur, Franck Ribéry, a inscrit 3 buts de moins que le soi-disant mauvais joueur, Sidney Govou. Et une contre-vérité, une. Mieux encore, si on rentre un peu plus dans le détail des chiffres, on s’aperçoit que les deux joueurs ont inscrit leur dernier but en Bleu lors de leur 36ème sélection : contre la Lituanie en avril 2009 pour Ribéry, contre l’Autriche en septembre 2008 pour Govou. Et là, du coup, le chiffre saute encore plus aux yeux : 7 buts en 36 sélections contre 10 buts en 36 sélections pour le nouveau joueur du Panathinaikos… Si on compare Ribéry à d’autres joueurs de sa génération évoluant au même poste, il n’est pas non plus au top : Robben compte 13 buts en 50 sélections, Schweinsteiger 21 buts en 80 sélections, seul Iniesta compte à peu près les mêmes statistiques, avec 7 buts en 48 sélections.

Autre point important, les performances de l’équipe quand ces deux joueurs étaient sur le terrain. En 48 sélections, Ribéry n’a gagné que 24 fois, là où Govou a gagné 27 fois. Dans la même veine, 11 défaites pour l’ancien Marseillais, 9 pour l’ancien Lyonnais… Et lorsque Govou était sur le terrain, l’équipe de France a en moyenne marqué 1,61 buts par matchs contre seulement 1,25 pour Ribéry. Que dire donc de la réputation ultra-défensive de l’ancien joueur de Gerland ? La question qui vient ensuite est la suivante : les buts inscrits par le chti sont-ils plus décisifs que ceux inscrits par Govou ? Chez ce dernier, 7 de ses 10 buts sont décisifs : contre le Japon (but du 2-1), la Belgique (but du 1-0), l’Italie (but du 1-0 et du 2-1), le Maroc (but du 1-1) et la Suède (but du 2-1 et but du 3-1, décisif car réduction du score à 3-2). Chez Ribéry, 6 seulement sont décisifs : contre l’Espagne (but du 1-1), l’Ukraine (but du 1-0), la Colombie (but du 1-0), la Roumanie (but du 1-2) et la Lituanie (but du 1-0 par deux fois). Notons toutefois que les deux buts inscrits face à la Lituanie ont d’ailleurs été « très » décisifs, puisque déterminants dans la difficile course à la qualification pour la Coupe du Monde 2010. Au final, Govou n’est donc pas, dans les faits, moins décisif « comptablement » que le génie Ribéry…

Autre donnée qui peut encore rabaisser les stats de notre ami Ribéry : si on y regarde de plus près, le premier point qui ressort c’est que Govou a été « moins » sélectionné que le p’tit gars de Boulogne (49 sélections en 8 ans contre 48 sélections en 4 ans). De plus, ce dernier a été titulaire à 40 reprises avec les Bleus, contre seulement 22 fois pour le nouveau coéquipier de Djibril Cissé et Cédric Kanté. Et si on regarde ces matchs joués comme titulaires, Govou a inscrit 8 buts en 22 matchs, contre 7 en 40 matchs pour Francky, qui n’a donc pas de quoi fanfaronner… Enfin, au niveau de la réputation qu’a Sidney d’apporter défensivement, les Bleus ont encaissé 0,86 but par matchs quand il a joué, contre 0 ,71 but par matchs avec le Munichois. Si par contre on ne prend que les matchs disputés comme titulaire, l’équipe de France a encaissé 1,1 buts par match ; pas mieux…

Tout ça pour dire qu’il est facile de tirer sur l’ambulance Govou, qui n’est effectivement pas le plus technique et le plus réjouissant des joueurs de foot qu’a pu connaître l’équipe de France, mais qui, en son temps, a fait le boulot comme on dit. Quand on pense en plus qu’une partie des critiques qu’il cristallisait étaient dues au fait qu’il jouait pour l’OL, un club que les supporters des traditionnels grands du football français détestent ou ont détesté par jalousie, c’est assez incompréhensible, d’autant plus que Ribéry, encensé depuis sa confirmation lors de son passage à l’OM, a des statistiques en Bleu encore plus mauvaises que l’ancien Lyonnais, même si je n’ai pas pu trouver les chiffres des passes décisives (mais je ne crois pas que Ribéry soit non plus un grand passeur, à part peut-être avec Zahia). Alors oui, Ribéry ça fait rêver, parce que ça va vite, ça percute et ça dribble, mais si c’est pour faire comme à la Coupe du Monde, ça ne sert à rien (ceci n’étant pas pour dire que Govou a été meilleur, loin de moi cette idée)… D’autant plus que niveau état d’esprit, Ribéry, ça n’a pas l’air d’être trop ça… Au final pour conclure, Ribé c’est 48 sélections pour 7 buts, Manu Petit 50 sélections pour 6 buts. Cherchez l’erreur !

Allez, je vous laisse, à ce soir pour la petite finale !

Alex.

3 Réponses to “L’affrontement Govou-Ribéry”


  1. 1 Félix juillet 10, 2010 à 10:41

    Je pense qu’il faut malgré tout remettre les stats dans leur contexte.

    Govou a connu la période pré Domenech, où il a joué 10 matchs dont un 5-0, un 6-0 et plusieurs match à 3 buts (bah oui, y avait pas Raymond). Tant mieux pour lui tu me diras, mais il faut bien constater que l’équipe de France de l’époque cartonnait un peu tout le monde, avec des éliminatoires pour l’euro 2004 parfaits (avec Zidane, ça marche toujours mieux).

    Ribéry, s’il ne représente pas la perfection, n’a connu « que » la Coupe du Monde 2006 et ce qui a suivi, c’est à dire 4 années d’équipe de France catastrophiques, où comme tu le soulignes, il a sauvé les miches de Raymond contre la lituanie 2 fois, en Roumanie et contre l’Ukraine, là où Govou a été décisif en amical (en dehors du France-Italie avec des italiens à la ramasse).

    Après, il faut aussi voir plus loin des statistiques et regarder l’influence dans le jeu d’un Ribéry comparé à un Govou, ce sont peut-être mes yeux de marseillais (qui ne jalouse pas vraiment l’OL), mais à ce petit jeu là, Ribéry a été pendant longtemps le seul rayon de soleil d’une équipe qui souffrait de la présence de Govou ou Malouda (dont il serait très intéressant de voir les stats calamiteuses) de 2006 à fin 2008.

    • 2 Alex juillet 10, 2010 à 10:54

      Concernant la période pré-Domenech, c’est pour ça que j’ai parlé des buts décisifs, dans les matchs à score élevé, Govou a toujours marqué le 5ème ou 6ème but, sans intérêt. Après l’impact Ribéry est clair lors des éliminatoires, je l’ai également souligné, et tout le monde voit bien que quand tu gagnes contre le Japon ou le Maroc on sait bien que c’est pour le fun 🙂

      J’ai été assez déçu de ne pas trouver les stats des passes décisives de Ribéry, mais comme je le dis je ne pense pas qu’il y en ait beaucoup, la force de Ribéry étant avant tout individuelle. Perso, je trouve ce dernier vraiment intéressant, et effectivement je ne dirai jamais qu’il n’a rien apporté, étant bien, comme tu le rappelles, un des rares rayons de soleil dans une équipe de pipes. Après niveau stérilité, les deux joueurs sont au même niveau, ils n’ont pas marqué depuis plus d’un an.

      L’objectif n’est pas de dire Govou est meilleur que Ribéry, tout le monde sait que c’est faux, l’objectif est plutôt de voir que Ribéry chez les Bleus ben c’est pas si terrible que ça, et son apport comptable n’est pas si bon que ça, ce qui est grandement impacté par le fait que son ratio buts par sélection se dilue rapidement vu qu’il ne marque plus. Après effectivement, contre l’argument Malouda je ne peux rien faire 🙂 Mais toujours est-il que Ribéry est loin d’être dans le top des joueurs de l’équipe de France en termes de réalisme, mais effectivement je n’enlève pas le fait qu’il a fait partie de la génération Domenech, ce qui l’a aussi pas mal aidé, puisque ce dernier était faible au point de lui céder pas mal de chose ou au point de le sélectionner même quand il n’était pas trop au point…

      La véritable influence de Ribéry elle est dans la dynamique plus que dans le jeu, ce n’est pas un numéro 10 c’est plus un joueur de coup, capable d’un trait de génie qui va changer le cours d’un match, comme est parfois capable de le faire Ben Ara par exemple (pour prendre un joueur marseillais). Ribéry il fait plaisir parce qu’il est capable d’apporter du plaisir (ce qui est important) mais quand ça passe pas, ça gonfle (comme Robben d’ailleurs).

      Tout ça pour dire, je ne tire pas sur Ribéry, je suis le premier à m’enflammer quand il réussit à nous faire sortir du bourbier, je fais juste un constat! Après j’ai aussi un peu de mal en prenant du recul à ressortir énormément de bons matchs de 90 minutes, mais je crois que c’est dû, comme je viens de le dire, à son style de jeu 🙂

      • 3 Alex juillet 10, 2010 à 10:55

        Et Malouda, 57 sélections 4 buts. Mais comme dirait Pierre Menès, pendant longtemps il a fallu qu’il ait des hémorroïdes pour ne pas jouer…


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